Je vis depuis l’âge de 36 ans avec le sentiment aigu d’être une créature, seule, isolée sur la Terre, dans un groupe, une société humaine, à l’intérieur d’un corps avec lequel je fusionne, lancé sur cette planète par une Puissance, une Force inconnue. Pourquoi suis-je là, enfermé dans une minuscule cellule mobile (mon corps) au milieu de milliards de milliards d’autres cellules mobiles (les corps des autres créatures humaines, animales, végétales et les plantes, etc… ) ?
Je suis dans cet océan de vie sans l’avoir demandé, sans comprendre pourquoi je suis là, et quel est le sens de cette expérience d’esprit prisonnier dans une cellule mobile, ayant une place infime sur la grande cellule spatiale qu’est la Terre, lancée dans une course folle dans l’éther infini, insondable et noir, vers je ne sais quelle fin.
Je suis donc un être perdu sur une île, comme un naufragé de l’espace, n’ayant rien choisi, ni ma naissance, ni ma famille, ni mes amis ou ennemis, ni mes professions, ni mon origine sociale, ni mes échecs, mes tristesses, mes amours, ni mes maladies ni ma mort.
Cette solitude existentielle est extrêmement forte et je gémis intérieurement devant l’absence de mode d’emploi à propos du rôle que la Puissance créatrice inconnue nous permet de tenir durant notre vie, chaque vie d’une durée différente pour chaque cellule vivante, au nombre incalculable, prisonnière sur Terre, comme moi. Pas d’égalité dans la durée ni dans la douleur. Les comparaisons d’âge et de durée de vie de chaque créature, des plus minuscules au plus gigantesques, sont terribles. Le moustique, la baleine, l’homme, l’enfant. Quelques heures, un jour, une semaine, une saison, cent ans ! Mais l’homme en est-il conscient ? De jouer dans un grand théâtre. Obligé de se nourrir, de nourrir les sous cellules qu’il engendre malgré lui, il n’a pas le temps de ressentir l’effroyable solitude de vivre sur une planète lancée dans une course monstrueuse dans un espace infini.
L’homme est, le plus souvent, un automate, un robot, primaire, qui vit sans inquiétude, Certains se distraient avec le foot ou le bridge. D’autres avec la bière, le vélo, les supporters.
Pas de limites aux distractions pour oublier qui nous sommes. Et ces distractions sont de plus en plus bêtes.
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Du janséniste Nicole : « Ainsi le monde entier est un lieu de supplice, où l’on ne découvre par les yeux de la foi que des effets effroyables de la justice de Dieu ; et si nous voulons nous le représenter par quelque image qui en approche, figurons-nous un lieu vaste, plein de tous les instruments de la cruauté des hommes, et rempli d’une part de bourreaux, et de l’autre d’un nombre infini de criminels abandonnés à leur rage. Représentons-nous que ces bourreaux se jettent sur ces misérables, qu’ils les tourmentent tous, et qu’ils en font tous les jours périr un grand nombre par les plus cruels supplices ; qu’il y en a seulement quelques-uns dont ils ont ordre d’épargner la vie ; mais que ceux-ci même n’en étant pas assurés, ont sujet de craindre pour eux-mêmes la mort qu’ils voient souffrir à tous moments à ceux qui les environnent, ne voyant rien en eux qui les en distingue.
Quelle serait la frayeur de ces misérables qui seraient continuellement spectateurs des tourments les uns des autres, qui y participeraient eux-mêmes, et qui appréhenderaient continuellement que ceux qu’ils souffrent ne se terminassent comme ceux des autres, par une mort cruelle et honteuse ? Les folles joies et les vaines inquiétudes du monde pourraient-elles trouver place dans leur esprit ? L’orgueil serait-il capable de les tenter dans ce malheureux état ? Et néanmoins la foi nous expose bien un autre spectacle devant les yeux. Car elle nous fait voir les démons répandus par tout le monde, qui tourmentent et affligent tous les hommes en mille manières, et qui les précipitent presque tous, premièrement dans les crimes, et ensuite dans l’enfer et dans la mort éternelle. »
Pierre Nicole est un théologien et un controversiste français, né le 19 octobre 1625 à Chartres,
mort le 16 novembre 1695 à Paris. Il est considéré comme un des principaux auteurs jansénistes.
Blaise Pascal, Sur la condition humaine, dans ses Pensées : « Qu’on s’imagine un nombre d’hommes dans les chaînes, et tous condamnés à la mort, dont les uns étant chaque jour égorgés à la vue des autres, ceux qui restent voient leur propre condition dans celle de leurs semblables, et, se regardant l’un l’autre avec douleur et sans espérance, attendent à leur tour. »
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On peut avoir un ami très apprécié depuis plus de cinquante ans, avec qui on a étudié à l’Université, se voir régulièrement, être le parrain de son fils, et s’opposer durement dans des discussions fiscales, juridiques, politiques. Avec l’âge, ces combats se multiplient. Il fait garder son sang-froid. Dommage ! Il faudrait refuser ces discussions dont on sort à vif. Les vieillards restent arc-boutés sur leurs certitudes même si on leur démontre qu’ils se trompent.
Le drame actuel de l’Eglise catholique a pour origine la remise en question, par certains hauts dignitaires ecclésiastiques durant le Concile voulu par Jean XXIII, des dogmes, certitudes et valeurs enseignées pendant des siècles. Ce pape, le bon Pape Jean, était un grand naïf. Il s’est trompé complètement car, ouvrant portes et fenêtres de l’Eglise, les prêtres et religieuses se sont envolés, se sont défroqués par milliers, contestant insidieusement la doctrine et la morale enseignées auparavant, remplaçant la Messe du Pape saint Pie V, dite du rite tridentin, par la Messe conciliaire à la fade liturgie, sans beauté, accompagnée de chants insipides. Le public a fui. Les églises occidentales sont quasi désertes maintenant, cinquante années après le Concile Vatican II, ou visitées par de rares vieillards. Et la situation n’a cessé de se dégrader, de plus en plus, jusqu’à aujourd’hui : des scandales inouïs montrent à ce jour que l’Eglise est devenue un arbre dont il est urgent de couper les branches pourries et de les jeter au feu.
Élévation du calice après la consécration lors d'une messe solennelle tridentine d’avant le concile Vatican II.
Note : Le rite tridentin désigne, dans la liturgie catholique, la liturgie telle que codifiée à la suite du concile de Trente et employée de manière canonique par la plus grande partie de l'Église latine jusqu'à la réforme liturgique opérée par Paul VI à la fin des années 1960 dans le contexte du concile Vatican II. L'adjectif « tridentin » (de Trente en Italie) est appliqué à cette forme du rite romain parce que le concile de Trente dans sa dernière session du 4 décembre 1563 a confié au pape Pie IV la révision du missel et du bréviaire. Le pape suivant, Pie V, a promulgué les éditions révisées du bréviaire le 9 juillet 1568 et du missel le 14 juillet 1570. Il a rendu obligatoire l’utilisation de ces deux textes dans toute l’Église latine, en faisant exception uniquement pour les lieux et les communautés où un autre rite a été célébré pendant plus de deux cents ans. C’est ainsi que, entre autres, le rite ambrosien, le rite mozarabe et les rites de plusieurs instituts religieux ont pu continuer légalement leur existence.
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La crise de l’Eglise, due à ses compromissions avec le monde moderne, au relâchement de la morale (on ne parle plus de péchés ni du sacrement de Pénitence), à l’esprit de relativisme, d’orgueil, à la bêtise et à l’inculture, cette crise aboutit à ce que le Christ avait annoncé : « Vous êtes le sel de la terre. Mais si le sel perd sa saveur, avec qui la lui rendra-t-on ? Il ne sert plus qu’à être jeté dehors, et foulé aux pieds par les hommes. » Les jeunes ne sont plus concernés par les célébrations eucharistiques, car la messe actuelle leur est devenue incompréhensible, sans saveur, sans lumière ni chaleur. Les prêtres sont des fonctionnaires aux discours lus et répétitifs. Les jeunes générations et leurs parents préfèrent maintenant le shit, la copulation, le concubinage, les courses cyclistes, les matches de foot, les ipod, les ipad, et les festivals de toute espèce plus vulgaires les uns que les autres. Les humains enchaînés à leurs écrans.
On apprend ce 29 septembre que le Pape François recommande avec force les prières pour se garder du Diable. Il n’est jamais trop tard pour remettre de l’ordre dans les écuries du Vatican. Encore faudrait-il de la part du Pape François qu’il veuille bien battre, lui aussi, sa coulpe suite à ses attitudes ambigües, où le oui n’est pas un oui et le non n’est pas un non ! Le pape jésuite jamais coupable et jamais responsable ! Y a –t-il encore un capitaine dans le vaisseau du Christ ?
Mais surprise surprise, le pape François vient donc de réagir et a demandé aux fidèles du monde entier de prier afin de protéger l’Eglise du Diable, qui tente toujours de nous séparer de Dieu et de nous diviser entre nous. Le Pape a demandé d’ajouter – fait exceptionnel – deux prières très anciennes de l’Eglise catholique. Le Sub tuum praesidium, qui dit notamment « Sainte Mère de Dieu, ne méprise pas nos prières quand nous sommes dans l’épreuve ». Et une prière à Saint Michel Archange, composée par le pape Léon XIII (1878-1903) qui était dite à chaque messe avant le concile Vatican II : « Saint Michel Archange, défends-nous dans le combat, sois notre secours contre la malice et les embûches du démon, nous le demandons en suppliant : que Dieu lui impose Son pouvoir ; et toi, Prince de la milice céleste, par la puissance divine, repousse Satan et les autres esprits mauvais qui rôdent dans le monde pour la perte des âmes. » (Sources : Le Figaro du 1er octobre).
Admirable prière d’appel au secours. Gardons l’espérance dans ces temps de ténèbres.
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D’Evelyn Waugh, né à Londres le 28 octobre 1903, mort à Taunton dans le Somerset le 10 avril 1966, écrivain britannique qui se caractérise par sa pratique très pure et raffinée de la langue anglaise et par son style sarcastique. Il écrit à la fin de sa vie : « Je ne veux plus d'expériences de vie. J’ai assez de bouteilles soigneusement déposées dans la cave, certaines mûrissant encore, prêtes à être bues, à perdre leur corps… Je ne veux pas influencer les opinions ou les événements, ni m’exposer à des imbéciles ou à quoi que ce soit de ce genre. Je ne veux pas être utile à qui que ce soit ni à quoi que ce soit. Je veux simplement faire mon travail d’artiste. »
Evelyn Waugh, sa femme et ses six enfants
Tout savoir sur Evelyn Waugh : https://fr.wikipedia.org/wiki/Evelyn_Waugh
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